Dans la déclaration commune des travaux de Madrid du 7 janvier 2010, on ne retient dans le verbiage diplomatique qu’un seul marchandage. Le bradage du gaz algérien contre une simple
promesse de soutenir «le droit à l’autodétermination du peuple sahraoui».
Pour arracher cette déclaration de principe qui ne coûte rien à Zapatero, Bouteflika a posé sur la table des négociations le gazoduc sous-marin Medgaz classé par
l’Espagne comme projet prioritaire. Alors que les travaux sont pratiquement achevés, la mise en service du projet reste tributaire de deux dossiers lourds: le prix du gaz et la part qui revient à
Sonatrach dans la commercialisation en Espagne et en Europe des 8 à 16 milliards de m3/an qui transiteront à terme par ce gazoduc. (1)
Même le lourd contentieux de Gassi Touil, qui coûte à l’Algérie un retard considérable, a été pardonné et balayé d’un revers de main. On rappelle que ce
mégaprojet gazier intégré GNL, initialement confié aux firmes espagnoles Repsol et Gaz Natural, avait été saboté. Les espagnols voulaient retarder sa réalisation tant que le gazoduc Medgaz ne
serait pas opérationnel et les contrats de livraison sécurisés.
On ne sait toujours pas quelle est la part du gaz dans les recettes d’exportation d’hydrocarbures. L’indexation de son prix sur celui du pétrole cause à l’Algérie
des fluctuations perturbantes et des pertes énormes que personne n’a pu chiffrer, en raison de l’opacité de gestion de Sonatrach, le secret des contrats commerciaux et l’absence totale de débat
sur ce sujet sensible. Bouteflika et son ministre de l’énergie Chakib Khellil ont même contrarié la proposition russo-iranienne de créer une OPEP du gaz pour définir et défendre une stratégie de
prix. (2)
José Luis Rodriguez Zapatero, qui entame son semestre à la présidence de l’UE, est placé en première ligne pour négocier au mieux les intérêts gaziers de
l’Europe. Il est donc prêt à signer des deux mains n’importe quelle déclaration que lui demandera Bouteflika, même sur l’autodétermination des aborigènes d’Australie ou des pingouins de
l’Antarctique.
Comme le cadeau gazier ne suffit pas, la déclaration de principe relève que «l’Espagne est devenue l’un des investisseur de référence en Algérie et souhaite
stimuler davantage les investissements espagnols dans des secteurs moteurs de développement en Algérie». Bouteflika souhaite que «les entreprises espagnoles participent et s’impliquent dans le
vaste programme national algérien d’équipements publics 2010-2014», c’est-à-dire jusqu’à la fin de son mandat. Le peu d’hommes politiques et de parlementaires conscients en Algérie se doivent de
dénoncer le bradage du gaz et des intérêts algériens dans une opacité totale, et remettre en cause ce que cache cette déclaration de Madrid.
En fait, Bouteflika n’a qu’une seule obsession: que l’ex-colonisateur espagnol et voisin maghrébin l’accompagne dans le combat de sa vie contre son pays natal
pour que le Maroc continue à souffrir.
Il est tellement honteux de son origine marocaine qu’il a effacé son lieu de naissance, Oujda, qui était auparavant mentionné dans sa biographie sur le site de la
présidence algérienne (www.elmouradia.dz).
Il a lié la politique énergétique de l’Algérie au destin de quelques enturbannés d’un Polisario fantôme présidé depuis 33 ans par un marocain, et dont la plupart
des membres fondateurs ont réintégré le royaume.
Saâd Lounès